juridictions d'exception pendant la guerre d'Algérie
Le décret du 27 avril 1961 institue un Haut Tribunal militaire. Les auteurs et complices des crimes et délits contre la sûreté de l’Etat et contre la discipline des armées ainsi que les infractions connexes, commis en relation avec les événements d’Algérie, peuvent être déférés au Haut Tribunal militaire.
Président : Maurice Patin, 66 ans, ancien combattant, docteur en droit (mort le 22 décembre 1962)
Général Georges Catroux, 84 ans (il ne put prendre ses fonctions de ministre-résident en Algérie en 1956 lors de la fameuse journée des tomates)
Général François Ingold, 67 ans (démissionne en 1962)
Décret du 3 mai 1961 instituant un tribunal militaire.
Décret du 18 mars 1962 instituant une cour martiale à Alger et une à Oran pour les auteurs d’attentats, sans instruction préalable, jugements susceptibles d’aucun recours ni pourvoi en cassation
Cependant deux décrets du 22 mars 1962 amnistient l’un les infractions commises au titre de l’insurrection algérienne, l’autre les faits commis dans le cadre des opérations de maintien de l’ordre dirigées contre l’insurrection algérienne
Le 23 mai 1962, l’avocat général réclame la peine de mort contre le général Salan (l’instruction a duré moins d’une semaine) mais à 23h45 celui-ci sauve sa tête, le Haut Tribunal militaire ayant, contre toute attente, voté les circonstances atténuantes …
De Gaulle est furieux …
Le gouvernement annonce, le 25 mai 1962, que la dissolution du Haut tribunal militaire est envisagée et qu’en tout cas, il est dessaisi des affaires OAS inscrites à son rôle, et au premier chef, du procès des accusés de l’affaire de Pont-sur-Seine.
Une ordonnance du 26 mai 1962 supprime le Haut tribunal militaire. Les audiences qui en dépendent sont reportées.
Le 1er juin 1962, ordonnance présidentielle créant la Cour militaire de justice (en remplacement du Haut tribunal militaire) : possibilité de constitution de partie civile contre les accusés, dispense pour les autorités recevant des recours de les transmettre, s’ils ne le veulent pas, aux juridictions compétentes, rattachement de la Cour au ministère des Armées et non à celui de la Justice … La Cour pourra prononcer le huis-clos et interdire le compte-rendu de ses débats !
Le 9 juin, le Conseil de l’Ordre des avocats proteste contre la création de la Cour militaire de justice.
Le 28 juin 1962, le lieutenant Roger Degueldre est condamné à mort par la Cour militaire de justice. (Il sera exécuté le 6 juillet)
Le décret du 17 juillet 1962 nomme le général de corps d’armée Roger Gardet président de la Cour militaire de justice en remplacement du général de Larminat, décédé (il a préféré le suicide au déshonneur le 1er juillet).
Le 19 octobre 1962, le Conseil d’Etat décide que l’ordonnance (présidentielle) du 1er juin 1962 qui avait institué « une cour militaire de justice » est annulée … en raison de « l’importance et de la gravité des atteintes que l’ordonnance attaquée apporte aux principes généraux du droit pénal en ce qui concerne notamment la procédure qui y est prévue et l’exclusion de toute voie de recours. »
Par les lois du 15 janvier 1963, de Gaulle crée la Cour de Sûreté de l’Etat.
Le 4 janvier 2011, Maître Guilloux du barreau de Vannes :
« La cour de sûreté de l'État … Cette juridiction d'exception avait été créée par le général de Gaulle pour juger les « terroristes ». Après la guerre d'Algérie, elle a été utilisée contre les opposants au régime. C'était surréaliste : en face de nous, nous avions des magistrats en robe nommés par décret du président de la République et des généraux en uniforme ! Même l'URSS de l'époque n'avait pas imaginé une cour aussi asservie au pouvoir politique ... »