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Manifestation PN Harkis 2012
4 novembre 2012

A Milianah d'Alphonse Daudet 1ère partie

 Cette fois, je vous emmène passer la journée dans une jolie petite ville d’Algérie …

 … Il va pleuvoir, le ciel est gris, les crêtes du mont Zaccar s’enveloppent de brume. Dimanche triste …

 Dans ma petite chambre d’hôtel, la fenêtre ouverte sur les remparts arabes …

Deux heures sonnent à l’horloge de la ville -un ancien marabout dont j’aperçois d’ici les grêles murailles blanches … Pauvre diable de marabout ! Qui lui aurait dit cela, il y a trente ans, qu’un jour il porterait au milieu de la poitrine un gros cadran municipal, et que, tous les dimanches, sur le coup de deux heures, il donnerait aux églises de Milianah le signal de sonner les vêpres ? … Ding ! Dong ! Voilà les cloches parties ! …

J’arrive sur la grande place. La musique du 3ème de ligne, qu’un peu de pluie n’épouvante pas, vient de se ranger autour de son chef … sur la place, le sous-préfet se promène de long en large au bras du juge de paix. Une demi-douzaine de petits Arabes jouent aux billes dans un coin avec des cris féroces.

La boutique de Sid Omar est ouverte. Entrons chez Sid Omar. Quoiqu’il ait une boutique, Sid Omar n’est point un boutiquier. C’est un prince du sang, le fils d’un ancien dey d’Alger qui mourut étranglé par les janissaires … A la mort de son père, Sid Omar se réfugia dans Milianah avec sa mère qu’il adorait, et vécut là quelques années comme un grand seigneur philosophe parmi ses lévriers, ses faucons, ses chevaux et ses femmes, dans de jolis palais très frais, pleins d’orangers et de fontaines. Vinrent les Français. Sid Omar, d’abord notre ennemi et l’allié d’Abd-el-Kader, finit par se brouiller avec l’émir et fit sa soumission. L’émir, pour se venger, entra dans Milianah en l’absence de Sid Omar, pilla ses palais, rasa ses orangers, emmena ses chevaux et ses femmes, et fit écraser la gorge de sa mère sous le couvercle d’un grand coffre … La colère de Sid Omar fut terrible : sur l’heure même il se mit au service de la France, et nous n’eûmes pas de meilleur ni de plus féroce soldat que lui tant que dura notre guerre contre l’émir. La guerre finie, Sid Omar revint à Milianah ; mais encore aujourd’hui, quand on parle d’Abd-el-Kader devant lui, il devient pâle et ses yeux s’allument.

…    

Ruiné par la guerre, il ne lui reste de son ancienne opulence qu’une ferme dans la plaine du Chélif et une maison à Milianah …

… on le trouve tous les après-midi dans une boutique attenant à sa maison et qui ouvre sur la rue. Le mobilier de cette pièce n’est pas riche : des murs blancs peints à la chaux, un banc de bois circulaire, des coussins, de longues pipes, deux braseros …

… foule bariolée. Il y a là des gens de tout cuir - Maltais, Mahonnais, Nègres, Arabes …

Il n’a rien vu non plus, ce petit Maltais dont les yeux de charbon luisent méchamment derrière sa barrette ; elle n’a rien vu, cette Mahonnaise au teint de brique qui se sauve en riant, son panier de grenades sur la tête …

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